VEILLE DE RECHERCHE EN ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR



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Avril 2025

32e édition

Un condensé mensuel des dernières publications scientifiques sur l’enseignement supérieur

Ce mois-ci :

 

  • Prêts à remboursement proportionnel au revenu et la vie des diplômés
  • Augmentation de l'accès à l'enseignement supérieur et inégalités salariales
  • Processus d'abandon des futurs enseignants
  • Impact de l'admission sur la persévérance

Bonjour à toutes et tous!

Nous vous rappelons que vous pouvez également accéder aux précédentes éditions de la veille en cliquant ici.

Bonne lecture!

 



L’impact du paiement d’un prêt à remboursement proportionnel au revenu sur la vie des diplômés

Les auteurs analysent l’impact de l’endettement étudiant sur la vie des diplômés en Angleterre. Ils fondent leur analyse sur 47 entrevues menées auprès de personnes diplômées depuis 10 à 12 ans. Les sujets partagent le fait d’avoir contracté un prêt à remboursement proportionnel au revenu (RPR) lors de leurs études. Les prêts RPR sont souvent caractérisés comme peu contraignants, puisque l’intérêt payé dépend du revenu du diplômé. Les auteurs contestent cette conception. On y rapporte une vaste gamme d’expériences diverses. La majorité des emprunteurs n’y déclare que des impacts mineurs. Par exemple, le remboursement du prêt influence le choix d’emploi pour certains. Le deuxième sous-groupe en importance déclare rencontrer des effets non désirés significatifs restreignant leur choix de vies allant jusqu’à les empêcher d’épargner pour leurs retraites.

Les entrevues ont été menées dans la période allant d’octobre à décembre 2020. L’échantillon représente selon plusieurs caractéristiques la diversité du corps étudiant. Pendant l’entrevue, les étudiants parlent de leur attitude face à l’endettement et des conséquences du remboursement du prêt sur leur vie courante.

Selon les réponses obtenues lors des entretiens, les auteurs forment trois groupes de diplômés distincts. D’abord, il y a les étudiants qui n’ont pas été affectés par l’endettement étudiant. Ce groupe est minoritaire et comprend 9 étudiants sur 47. Le second groupe est celui ayant rencontré des conséquences mineures. Ce groupe comprend 21 étudiants sur 47. Certains membres de ce groupe se distinguent du premier groupe par l'adoption de stratégies d’évitement pour balayer les conséquences potentielles de l’endettement. Ainsi, un étudiant de ce groupe poursuit des études à temps partiel pour lui permettre de gagner de l’argent tout en étudiant. Enfin, le troisième groupe inclut les diplômés mentionnant un impact majeur de l’endettement sur leur vie courante. Ces étudiants voient leur vie de tous les jours affectée par le paiement de leur dette étudiante. Les auteurs jugent que ces résultats nuancent la rhétorique que les prêts RPR sont inoffensifs pour les emprunteurs.



Pour en savoir plus : 

De Gayardon, A. & Callender, C. (2025). What is the impact of repaying income-contingent student loan debt on graduates’ lives? Lessons from England. Policy Reviews in Higher Education, 1–24. https://doi.org/10.1080/23322969.2025.2477574 




Pourquoi la croissance de l’enseignement supérieur ne réduit les inégalités salariales?

Les auteurs explorent de manière théorique la relation entre l’augmentation de l’accès à l’enseignement supérieur et les inégalités salariales dans la société. Les auteurs construisent un modèle économique qui calque le comportement des futurs étudiants. Ils soutiennent que l’augmentation de l’accès à l’enseignement supérieur ne réduit pas nécessairement les inégalités dans les salaires. La raison derrière l’augmentation de l’accès aux études supérieures est déterminante. Si l’accès augmente à la suite d’une diminution du prix des études, les inégalités tendent à diminuer à long terme. À l’inverse, si l’accès accru provient d'une meilleure rémunération des compétences, elle exacerbe les inégalités entre les individus.

Deux cas ressortent de l’analyse des auteurs. Le premier cas est celui d’une société méritocratique. Les employeurs accordent de la valeur aux habiletés davantage qu’au diplôme. Les emplois à hautes compétences sont davantage rémunérés. Cela rend les études attrayantes. Dans ce cas d’espèce, l’augmentation de la participation à l’enseignement supérieur tend à exacerber les inégalités salariales. Comme le salaire dépend davantage des habiletés, des inégalités se creusent entre les détenteurs de diplômes. Cela contredirait la pensée populaire selon laquelle les inégalités diminuent lorsque les gens s’éduquent davantage. Un problème sous-jacent à ce cas pratique est celui de la difficulté d’observer les habiletés directement pour l’employeur. Ce dernier peut plus facilement discriminer sur la base d’un diplôme (donnée objective) que sur la base des habiletés. Ce faisant, ce serait moins probable que des inégalités se creusent entre les détenteurs de diplômes. Le second cas est celui où le caractère méritocratique d’une société est plus faible. Le contraire se déroule. L’augmentation de la participation à l’enseignement supérieur diminue les inégalités.

Les auteurs vérifient leurs hypothèses avec les données de certains pays. Les données suggèrent que les pays en développement, plutôt méritocratiques, voient en majorité les inégalités se creuser lorsque l’accès à l’enseignement supérieur augmente. Ces nouveaux résultats permettent d’écarter ou de nuancer d’autres explications liées à ce phénomène. Longtemps, les chercheurs ont associé l’observation conjointe d’une augmentation de l’accès à l’enseignement supérieur et l’augmentation des inégalités salariales aux changements technologiques favorisant les travailleurs qualifiés. Lors de ces changements technologiques, la demande pour les travailleurs qualifiés augmente, rendant les études supérieures attrayantes. Certains auteurs ont montré que l’augmentation de l’accès due à cette raison est associée à l’augmentation des inégalités dans les pays développés, comme aux États-Unis, où la main-d’œuvre qualifiée est abondante. C’est moins le cas dans les pays en développement où la main-d’œuvre qualifiée est plus rare. L’angle méritocratique comble ce déficit dans l'explication.



Pour en savoir plus :

Kasuga, H. & Morita, Y. (2025). Why doesn’t expanding higher education decrease wage inequality? Education Economics, 1–13. https://doi.org/10.1080/09645292.2025.2477469 




L’abandon chez les futurs enseignants : examen d’un modèle théorique en phases
 
Les chercheurs évaluent empiriquement un modèle théorique en cinq phases décrivant le processus d’abandon des études universitaires. Les auteurs s’intéressent particulièrement aux programmes de formation des enseignants. Le modèle de Bäulke, Grunschel et Dresel (2022), conceptualise l’abandon comme un processus décisionnel en cinq étapes : (1) perception d’inadéquation, (2) pensées d’abandon, (3) délibération, (4) recherche d’alternatives et (5) décision finale. Les données suggèrent que le modèle décrit bien le processus d’abandon chez les étudiants en enseignement. On utilise un score de changement latent pour évaluer le modèle.

L’article repose sur des données longitudinales recueillies auprès de 215 étudiants inscrits dans des programmes de formation à l’enseignement dans six universités allemandes. Les étudiants sont interrogés à deux moments distincts de leur première année d’études. Les résultats soutiennent la validité du modèle proposé. Les cinq phases sont empiriquement distinctes et suivent généralement une séquence logique. Une analyse de scores de changement latents montre que les changements dans une phase sont fortement corrélés avec ceux de la phase suivante. Le résultat est particulièrement important pour les trois premières étapes.

Toutefois, la transition entre les deux dernières phases (recherche d’information et décision finale) s’avère moins claire, et l’ordre de ces étapes semble moins robuste. Cela peut être dû à des limites méthodologiques, comme un effet plancher dans les données ou la complexité réelle du processus de décision.

L’article souligne l’intérêt d’un modèle en phases pour identifier rapidement les étudiants à risque d’abandon. Il propose des pistes d’intervention ciblées à chaque étape du processus. Il recommande par exemple le mentorat en cas de perception d’inadéquation, ou l’accompagnement par des services de conseil lors de la délibération ou la recherche d’alternatives. Une importante limite de l’article provient du fait que les chercheurs n’observent pas réellement si l’étudiant abandonne. Malgré ses limites, cette recherche améliore la compréhension de l’abandon comme un processus dynamique. Elle offre une base pour des politiques de prévention plus personnalisées.



Pour en savoir plus:

Wild, S., Reisch, D., Kunina-Habenicht, O. & Grassinger, R. (2025). Dropout among prospective teachers: validation of a phase-oriented theoretical model. Studies in Higher Education, 1–15. https://doi.org/10.1080/03075079.2025.2488476




Les politiques d’admission et le taux de persévérance

Les auteurs étudient la relation entre les caractéristiques de la politique d’admission d’un établissement et les taux de persévérance des étudiants. Un modèle de régression linéaire multiple est utilisé. Deux constats sont mis en lumière. D’abord, l’obligation de fournir une lettre de recommandation dans sa demande d’admission est associée à de plus hauts taux de persévérance. Ensuite, il n’existe pas de relation significative entre une politique de déclaration de note facultative et le taux de persévérance. Depuis la pandémie de Covid-19, plusieurs d’établissements ont enlevé l’obligation de fournir les résultats aux tests SAT dans l’admission. Pour tenir compte de certains biais liés aux facteurs confusionnels, les auteurs font appel à une stratégie d'estimation à variables instrumentales.

Les auteurs fondent leur analyse sur l’utilisation d’une base de données provenant de deux sources de données administratives américaines. Ils concentrent l’analyse sur la cohorte d’étudiants ayant fait une demande d’admission à l’automne 2020 pour un début à l’automne 2021. Les établissements visés par l’étude sont toutes les universités publiques et privées.

Dans le modèle de régression, des variables continues et binaires distinguent les caractéristiques des politiques d’admissions. On indique, pour chacun des candidats, son résultat au test d’admission, l’obligation de fournir une lettre de recommandation et le rang de son école secondaire. Quelques variables de contrôle sont ajoutées au modèle pour tenir compte des différences entre universités.

L’obligation de fournir une lettre de recommandation est corrélée positivement et largement avec le taux de persévérance (+ 1,6 %). Pour les auteurs, ce paramètre d’une demande d’admission agit comme un signal crédible de la préparation d’un candidat à poursuivre des études supérieures. Les résultats confirment les études précédentes en montrant qu’il n’existe pas de lien significatif entre la déclaration de note facultative et le taux de persévérance des étudiants. Cette absence de lien s’explique en partie par la généralisation de cette politique d’admission dans l’échantillon d’établissements étudiés. Cela pourrait indiquer une importance accrue accordée aux autres éléments du dossier de candidature.




Pour en savoir plus :

Ma, A. C., Bouvet, F., Ratcliff, R., Campbell, J., & Sumner, S. (2025). Admissions policies and colleges’ retention rates. Education Economics, 1–19. https://doi.org/10.1080/09645292.2025.2487504  



 

 

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Le Groupe de recherche en économie publique appliquée étudie les différentes politiques d’intervention de l’État. Il est actif en enseignement supérieur, en fiscalité et en simulations de politiques publiques.
 

 




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