*VEILLE DE RECHERCHE EN ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR*
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Avril 2023
15^e édition
/Un condensé mensuel des dernières publications scientifiques sur
l’enseignement supérieur/
*Ce mois-ci :***
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* L'enseignement en ligne et la procrastination des étudiants
* L'effet de l'encadrement individuel à l'université
* L'impact des frais de scolarité sur les étudiants étrangers
* Les réseaux de pairs de même ethnicité à l'université et la
réussite professionnelle
Ce mois-ci, la veille de recherche en enseignement supérieur porte une
attention particulière sur l'étude de certains facteurs de réussite à
l'université.
Nous vous rappelons que vous pouvez également accéder aux précédentes
éditions de la veille en cliquant ici
<https://listes.grepa.ca/archives/list/veille@listes.grepa.ca/latest>.
Bonne lecture!**
*Les effets de l'enseignement en ligne sont-ils amplifiés par la
procrastination?*
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La popularité de l’enseignement universitaire en ligne a pavé la voie à
une grande renouée des chercheurs pour le sujet. De Paola, Gioia et
Scoppa (2023) étudient l'interaction entre la procrastination et
l’enseignement en ligne et leurs effets sur la réussite académique. En
somme, les auteures cherchent à savoir si les problèmes académiques liés
à la procrastination sont exacerbés par l’enseignement en ligne.
Les auteures étudient ce phénomène en utilisant les données
administratives de l’université Calabria située dans le sud de l’Italie.
Ces données portent sur quatre cohortes d’étudiants, soit celles ayant
commencé leur baccalauréat en 2016/2017 jusqu’à 2019/2020. Les données
portent sur les quatre années d’étude de ces cohortes. L’échantillon
complet est donc composé de 23 283 étudiants et 96 361 observations.
Bien que les activités d’enseignement soient généralement offertes en
ligne, la pandémie de COVID-19 a forcé l’université Calabria à offrir
exclusivement des cours en ligne pour la majeure partie du semestre
d’hiver 2020. Les auteures exploitent ce changement de méthode pour
effectuer une régression par différence en différence. Elles comparent
la différence des résultats aux examens des semestres d’hiver 2017, 2018
et 2019 à ceux de 2020.
Pour évaluer le niveau de procrastination, les auteures construisent une
variable basée sur le comportement des étudiants lors du processus
d'inscription au baccalauréat. Au début de ce processus, l’université
notifie tous les étudiants admis exactement à la même date. La variable
/Procrastination /attribue une valeur de 0 aux étudiants ayant complété
l’inscription dans les sept jours suivants la notification et une valeur
allant jusqu’à 6 pour les étudiants s’inscrivant à la dernière minute.
Les auteurs estiment qu’il s’agit d’un bon proxy pour évaluer le degré
de procrastination d’un étudiant. À leur analyse, les auteures intègrent
aussi des variables de contrôle par rapport aux cas de COVID-19 et à
l’accès internet afin d’isoler les effets liés à la pandémie elle-même.
De Paola, Gioia et Scoppa (2023) trouvent un impact négatif de
l’enseignement en ligne sur la réussite académique de l’ensemble des
étudiants. Le changement vers un l’enseignement en ligne est associé à
une réduction de 1,43 crédit réussi. Lorsqu’on porte attention aux
étudiants qui ont tendance à procrastiner, le changement vers les cours
en ligne est associé à une réduction de 1,77 crédit réussi. Les auteures
affirment que les résultats suggèrent bel et bien que les cours en ligne
ont des effets négatifs pires pour les étudiants qui procrastinent. À
cet effet, elles proposent d’étudier plus en détail les impacts de
programmes visant à améliorer l’auto-organisation de ces étudiants.
_Pour en savoir plus : _
De Paola, M., Gioia, F., & Scoppa, V. (2023). Online teaching,
procrastination and student achievement. /Economics of Education
Review/, 94, 102378.
https://doi-org/10.1016/j.econedurev.2023.102378
<https://doi-org/10.1016/j.econedurev.2023.102378>
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*L’encadrement individuel améliore-t-il la réussite à l’université?*
De plus en plus de soutien pédagogique est offert dans les universités
en vue d’améliorer les résultats académiques des étudiants en
difficulté. Valentine et Price (2023) étudient l’impact de l’une de ces
techniques, soit l’encadrement individuel (coaching) dans les collèges
communautaires (community colleges).
Pour étudier l’impact de l’encadrement individuel, les auteurs ont
travaillé de concert avec dix collèges communautaires de l’État de la
Caroline du Nord lors de la mise en place en 2016 d’un programme
d’encadrement individuel des étudiants. L’idée maîtresse de ce programme
est d’assigner des étudiants à un coach personnel dont le rôle est de
s’assurer proactivement que l’étudiant ait accès aux services d’aides
financières, administratives et académiques dont il a besoin.
Les auteurs ont réalisé une étude d’impact du programme en effectuant un
test par assignation aléatoire. L’échantillon étudié comprend des
étudiants de première année des cohortes de l’automne 2016 à l’automne
2018, soit un total de 10 796 étudiants. La moitié de ces étudiants ont
été aléatoirement assignée au groupe traitement et ont reçu l’aide du
programme en question alors que l’autre moitié ont été assignée au
groupe contrôle et n’ont pas eu accès au programme. Les variables
d’intérêt des chercheurs sont entre autres le taux de rétention des
étudiants et la complétion des crédits.
Les résultats montrent que les effets de l’encadrement individuel des
étudiants sont limités. D’abord, il n’y a aucun effet significatif sur
la rétention des étudiants à court terme, c’est-à-dire dans la première
année d’enseignement. Toutefois, le programme a un effet positif sur la
rétention à plus long terme. Les étudiants ayant eu accès à
l’encadrement individuel ont 1,7% plus de probabilités d’être encore
inscrits après deux années d’études. Ensuite, les auteurs ne trouvent
aucun effet significatif sur la complétion des crédits. Finalement,
l’encadrement peut avoir un effet particulier pour certains
sous-groupes. En particulier, la probabilité de rétention après un an et
demi d’étude chez ceux qui ont un encadrement personnel augmente pour
les hommes (+3,6%), les étudiants noirs (+3,0%) et les étudiants à temps
complet (+2,1%).
Valentine et Price (2023) pensent que les résultats de leur étude
suggèrent quelques implications pratiques et théoriques. Premièrement,
les effets de l’encadrement individuel sont observables sur le long
terme. Deuxièmement, les effets tendent à être ciblés chez certaines
parties de la population étudiante.
_Pour en savoir plus : _
Valentine, J. L., & Price, D. v. (2023). Coaching to Completion: Impacts
of Success Coaching on Community College Student Attainment in North
Carolina. /The Review of Higher Education/, 46(3), 343–371.
https://doi.org/10.1353/RHE.2023.0002
<https://doi.org/10.1353/RHE.2023.0002>
*Comment les frais de scolarité pour étudiants étrangers affectent-ils
leur comportement?*
Zullo et Churkina (2023) étudient l’effet de l’introduction de frais de
scolarité sur la mobilité des étudiants internationaux. Cette étude
repose sur un changement de politique publique concernant la facturation
des étudiants internationaux en Allemagne qui permet aux auteurs de
réaliser une étude quasi expérimentale.
Entre 2006 et 2014, un changement de politiques publiques imposé par la
Cour fédérale constitutionnelle d’Allemagne a permis aux États (Länder)
allemands d’imposer des frais de scolarité de 500 euros par semestre aux
étudiants internationaux, chose qui avant et après cette période a été
interdite à travers le pays. Des seize États, sept se sont prévalus de
cette opportunité et ont introduit des frais de scolarité pour les
étudiants internationaux.
Pour étudier l’effet des frais de scolarité, les auteurs utilisent deux
méthodes. Dans un premier temps, ils réalisent une régression par
différence-en-différence en comparant les États ayant introduit les
frais de scolarité (groupe traitement) à ceux n’ayant pas introduit de
frais de scolarité (groupe contrôle). Dans un second temps, ils
utilisent une méthode de contrôle synthétique. L’idée de cette approche
est de comparer les résultats des États ayant introduit les frais de
scolarité à un modèle contrefactuel où ces États n’auraient pas
introduit les frais de scolarité. Dans les deux cas, la variable
d’intérêt que les chercheurs observent est l’inscription universitaire
des étudiants internationaux.
Les résultats obtenus sont mitigés. Pour la méthode de
différence-en-différence, on observe une réduction de 11,3% des
effectifs étudiants étrangers de première année dans les États ayant
introduit les frais. Toutefois, lorsqu’on observe cet effet par État,
seulement un seul (la Basse-Saxe) montre une réduction à un niveau
significatif. La méthode de contrôle synthétique, quant à elle, suggère
que les inscriptions d’étudiants internationaux auraient très peu changé
si des frais n'avaient pas été introduits.
Les auteurs concluent que l’imposition des frais de scolarité n'a pas
créé de réallocation majeure des étudiants étrangers en Allemagne. Selon
eux, les frais de scolarité ne seraient pas un critère majeur dans le
choix d’emplacement d’étude des étudiants internationaux.
_Pour en savoir plus: _
Matteo Zullo & Olga Churkina (2023) A quasi-experiment in
internationalstudent mobility: Germany’s fee re-introductions, /European
Journal of Higher Education/, 13:1, 22-43,
https://doi.org/10.1080/21568235.2021.1983451
<https://doi.org/10.1080/21568235.2021.1983451>
<https://doi.org/10.1080/00221546.2022.2044976>__
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*Les réseaux de pairs de même ethnicité à l’université aident-ils les
étudiants à réussir leur carrière?*
Les facteurs de succès à l’université sont multiples et parmi ces
facteurs, la présence d’un réseau de soutien est potentiellement
importante. Être dans un milieu d’étude entouré de personnes d’un même
groupe peut faciliter la réussite à travers le référencement d’emploi et
l’effort déployé en classe. Chellman, Conger et Turner (2023) testent
cette hypothèse. Plus spécifiquement, ils étudient l’impact des réseaux
de personnes de même race/ethnicité à l’université sur les conditions de
travail après la diplomation.
La recherche des auteurs est réalisée grâce à des données
administratives d’un grand système d’enseignement postsecondaire urbain
(dont le nom n’est pas révélé) aux États-Unis. L’échantillon comprend
les étudiants de onze cohortes débutant aux semestres d’automne de 2000
à 2011. La taille complète de l’échantillon est de 151 181 étudiants.
Les données ont ensuite été fusionnées aux données administratives de
l’État dans lequel se trouvent les établissements d’enseignement.
L’analyse des auteurs porte sur quatre groupes ethniques, soit les
personnes d’origine asiatique et les habitants des îles du Pacifique
(AHIP), les personnes noires, les hispanophones et les personnes
blanches. Les variables d’intérêt des chercheurs comprennent la
diplomation, le revenu après la diplomation et la réussite scolaire.
Pour identifier l’effet des réseaux étudiants, les auteurs élaborent un
devis de recherche de différence-en-différence. Le postulat central de
l’étude est que les caractéristiques des étudiants avant leur
inscription ne sont pas corrélées avec une hausse de la part d'étudiants
de même ethnicité au sein de leur réseau social. Conséquemment, si on
isole les groupes d'étudiants qui ont vécu une hausse de la part de leur
ethnicité chez leurs pairs, on peut identifier les effets liés à cette
hausse. La méthode de différence-en-différence employée par les auteurs
compare les résultats des étudiants pour qui il y a eu une telle hausse
(groupe traitement) à ceux qui ne l’ont pas vécu (groupe contrôle). Il
faut noter ici qu’on ne peut pas déterminer directement si les étudiants
font partie d’un réseau de pair de même ethnicité. C’est pourquoi les
auteurs parlent de réseau potentiel.
Les résultats montrent que l’effet des réseaux potentiels est
différencié selon l’ethnicité concernée. Pour les étudiants noirs et les
étudiants blancs, une augmentation de 1% de la part du réseau potentiel
est associée à une augmentation significative du salaire de 0,6% et 0,4%
10 ans après l’admission. Cependant, il n’y a aucun effet significatif
pour les étudiants d’origine AHIP et les étudiants hispanophones.
D’autre part, la réussite scolaire (mesurée par le nombre de crédits
complétés) et la diplomation ne sont pas affectées par le réseau
potentiel des étudiants. Dernier résultat intéressant, les étudiants
hispanophones voient leur probabilité d’emploi réduite lorsqu’ils sont
dans une cohorte ayant subi une hausse de la part d’hispanophones.
Bien qu’il y ait des résultats significatifs, il faut toutefois
souligner que les effets trouvés restent relativement petits. Les
auteurs concluent donc que les différences de conditions sur les marchés
du travail entre les groupes ethniques ne peuvent être expliquées par
les réseaux potentiels des étudiants à l’université.
_Pour en savoir plus:_
Chellman, C., Conger, D., & Turner, L. J. (2023). Race and nativity
earnings gaps: The role of college networks. /Economics of Education
Review/, /93/, 102356.
https://doi.org/10.1016/j.econedurev.2023.102356
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Le Groupe de recherche en économie publique appliquée étudie les
différentes politiques d’intervention de l’État. Il est actif en
enseignement supérieur, en fiscalité et en simulations de politiques
publiques.
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