VEILLE DE RECHERCHE EN ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

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Janvier 2023

12e édition

Un condensé mensuel des dernières publications scientifiques sur l’enseignement supérieur

Ce mois-ci :

 


- L'effet du processus d'admission sur le marché du travail

- L'impact d'une politique d'admission équitable au Texas

- Le remboursement proportionnel au revenu et la dette étudiante

- Les cours préparatoires et la participation universitaire

L'équipe de la veille de recherche du GREPA vous souhaite une bonne année 2023!


Nous vous rappelons que vous pouvez également accéder aux précédentes éditions de la veille en cliquant ici.


Bonne lecture!

 

 

 

 


Quels sont les effets liés à la manière dont les universités admettent les étudiants?

Bien que la plupart des universités n’utilisent que des critères académiques dans leurs processus d’admissions, les universités les plus prestigieuses intègrent aussi des critères non-académiques qui permettent à certains étudiants n’atteignant pas le niveau académique suffisant d’être admis. On appelle cette méthode d’admission les admissions discrétionnaires.

Kamis, Pan et Seah (2023) s’intéressent aux effets liés à l’utilisation des différentes formes d’admission. Spécifiquement, les auteurs cherchent à savoir si les étudiants ont des conditions différentes sur le marché du travail selon le processus d’admission qu’ils ont suivi. Il s’agit, selon les auteurs, d’une question qui n’a jamais été étudiée précédemment.

Les auteurs tentent d’identifier le lien causal avec une méthode de régression par discontinuité. Ils exploitent une caractéristique spéciale du processus d’admission de l’université de Singapour qui offre aux candidats deux parcours d’admissions. Le premier est dit « régulier » et basé uniquement sur les compétences académiques. Le second est dit « discrétionnaire » et basé sur des qualités non-académiques. Ce dernier processus vise les étudiants qui n’atteignent pas le seuil des critères de l’admission régulière. En portant attention au décile inférieur des étudiants admis par processus régulier, les auteurs isolent un groupe contrôle qui sera comparé au groupe traitement (admission discrétionnaire). L’échantillon est constitué des d’étudiants admis entre 2009 et 2013 à l’université de Singapour. Le groupe contrôle est composé de 2 157 observations et le groupe traitement de 1 278. Les chercheurs ont couplé les données administratives de l’université avec des dossiers fiscaux accessibles pour étudier l’impact du processus d’admission sur le marché du travail.

Les résultats obtenus par les auteurs montrent des différences significatives entre les groupes. Au niveau académique, les étudiants admis par processus discrétionnaire avaient de 3,5 % à 3,8 % plus de chance de s’inscrire à une mineure ou un seconde majeure au cours de leur baccalauréat. Une majeure correspond à la (ou l’une des) discipline principale de l’étudiant au cours de ses études de premier cycle alors qu’une mineure correspond à une discipline secondaire. Ces étudiants avaient aussi 6 % à 7 % plus de chances de participer à des programmes d’échange étudiant à l’étranger. Au niveau non-académique, les auteurs trouvent des effets sur le marché du travail. Les étudiants ayant bénéficié de l’admission discrétionnaire avaient 3,9 % plus de chances d’avoir un emploi à temps plein six mois après leur diplomation et avaient un salaire moyen de 4,5 % à 5,3 % supérieur deux à trois ans respectivement après la diplomation.

Kamis, Pan et Seah (2023) concluent que les étudiants admis par processus discrétionnaire ont de meilleures performances sur le marché du travail que les étudiants admis par le processus régulier. Ce résultat suggère qu’une approche holistique d’admission peut permettre aux universités d’identifier les meilleurs candidats potentiels aux bas niveaux des performances académiques et d’améliorer les taux de placements.


Pour en savoir plus :

Kamis, R., Pan, J., & Seah, K. K. (2023). Do college admissions criteria matter? Evidence from discretionary vs. grade-based admission policies. Economics of Education Review, 92, 102347. https://doi.org/10.1016/J.ECONEDUREV.2022.102347

 

 

 


Une politique d’admission universitaire plus équitable peut-elle aussi être plus efficace?

Black, Denning et Rothstein (2023) tentent d’évaluer l’impact de l’ouverture du processus d’admission universitaire à des étudiants de milieux moins favorisés. Pour y arriver, ils étudient une réforme des processus d’admission dans le réseau public universitaire au Texas en 1998. Cette réforme appelée la Top Ten Percent Rule (règle du dix pourcent) a forcé les universités publiques (même les plus sélectives) à garantir l’admission à tout étudiant finissant du secondaire dans le top 10 % de sa classe. Cette politique a permis à de nombreux étudiants provenant d’écoles dans des milieux défavorisées d’accéder aux meilleures institutions publiques d’enseignement supérieur.

Pour identifier l’effet de la réforme, les auteurs ont employé une différence en différence qui compare les changements des conditions sur le marché du travail des étudiants affectés par la réforme avec celles de ceux qui ne le sont pas. Deux groupes d’étudiants risquent d’être affectés par la réforme et constituent donc les groupes traitement. Il s’agit des « pulled in », les étudiants du top 10 % d’écoles défavorisés, et les « pushed out », les étudiants d’écoles favorisées dont les notes sont juste en-dessous du seuil du top 10 %. Le groupe contrôle est quant à lui constitué d’étudiants au-delà de la moyenne, mais qui n’aurait pas été admis à une université sélective (comme UT Austin) avant ou après la réforme.

Les auteurs notent que l’admission des étudiants pulled in ont 6,6 % plus de chance d’être admis dans un programme de premier cycle d’une université publique et 5,3 % plus de chance d’être admis à UT Austin, l’université la plus sélective. La réforme a aussi augmenté de 3,9 % la probabilité de diplomation des pulled in. Neuf à onze ans après la diplomation, les revenus de ce groupe étaient égaux ou supérieur au scénario sans réforme. Du côté des pushed out les auteurs ne trouvent à peu près pas d’effets liés à la réforme. Le seul effet significatif est la baisse de probabilité d’admission de 2,1 % à UT Austin.

Les auteurs argumentent que la politique du Top Ten Percent Rule a eu des effets bénéfiques pour la société. Cette politique a amélioré les conditions académiques et économiques de personnes provenant d’un milieu défavorisé sans conduire à l’amenuisement de conditions d’autres personnes. En ce sens il s’agirait d’un type de réforme à la fois équitable et efficace.


Pour en savoir plus:

Black, S. E., Denning, J. T., & Rothstein, J. (2023). Winners and Losers? The Effect of Gaining and Losing Access to Selective Colleges on Education and Labor Market Outcomes. American Economic Journal: Applied Economics, 15(1), 26–67. https://doi.org/10.1257/APP.20200137

 

 

 


Le mode de remboursement de la dette étudiante a-t-il un impact sur les risques de défauts de paiement?

Herbst (2023) étudie le remboursement de la dette étudiante aux États-Unis. La plupart des étudiants ayant une dette à rembourser sur leurs prêts d’étude ont une entente de remboursement par versements fixes. Toutefois, certaines ententes de remboursement sont proportionnelles au revenu (RPR). Ces ententes font varier les paiements minimums en fonction du revenu. Herbst tente d’évaluer l’impact du RPR sur la santé financière des diplômés.

Pour réaliser cette étude, Herbst utilise les données d’une compagnie est restée anonyme qu’il appelle Large Loan Servicer (LLS) et qui gère 300 milliards de dollar US de dette étudiante pour le compte du ministère de l’Éducation américain. L’échantillon utilisé est composé de 133 630 individus ayant une dette gérée par LLS entre 2010 et 2018 et dont les caractéristiques les rendent admissible au programme de RPR. Pour identifier l’effet causal, Herbst procède à la fois par méthode de variable instrumentale et par différence en différence.

LLS fait des appels téléphoniques aléatoires aux emprunteurs qui sont dans des situation de défaut de paiement. Au cours de ces appels les agents de LLS proposent un plan de RPR. Herbst exploite cette méthode de travail pour construire un indice d’agent (agent score) qui permet d’estimer le changement d’un remboursement fixe vers un plan RPR. L’indice d’agent est la variable instrumentale utilisée pour estimer les variables d’intérêt. Les appels téléphoniques permettent aussi à l’auteur de faire une évaluation par différence en différence. Avec cette stratégie de recherche, Herbst compare les différences pré/post appels téléphoniques entre les emprunteurs qui changent pour le plan RPR et ceux qui restent sur le plan régulier.

À court terme, les résultats montrent que le plan RPR tend à réduire les défauts de paiement de 19 % après dix jours et de 8 % après quatre-vingt-dix jours. L’effet de ce changement tend toutefois à se dissiper avec le temps. À plus long terme, Herbst trouve des effets positifs sur la santé financière des emprunteurs. En particulier, les emprunteurs ayant utilisé le plan RPR ont 1,8 % plus de chance d’augmenter leur salaire quarante-deux mois après l’appel téléphonique. La cote de crédit des emprunteurs augmente de 6,65 points un an après l’appel et la probabilité d’avoir une hypothèque augmente de 9% quatre ans après l’appel.

Herbst conclut que le remboursement proportionnel au revenu a des effets positifs sur la santé financière des anciens étudiants. Selon lui, ces résultats illustrent les bénéfices liés à la flexibilité des ententes de remboursements de la dette étudiante et montre l’importance de considérer les effets comportementaux lors de leur conception.


Pour en savoir plus:

Herbst, D. (2023). The Impact of Income-Driven Repayment on Student Borrower Outcomes. American Economic Journal: Applied Economics, 15(1), 1–25. https://doi.org/10.1257/APP.20200362

 

 

 


Les cours préparatoires ont-ils un impact sur la participation universitaire?

Aux États-Unis plusieurs cours préparatoires (Advance Placement Course) sont offerts aux étudiants du secondaire cherchant à augmenter leurs chances d’être admis dans une institution d’enseignement supérieur sélective. Conger, Long et McGhee (2023) évaluent l’effet des cours préparatoires sur l’inscription universitaire.

Pour évaluer cet effet, les chercheurs ont élaboré une expérience par assignation aléatoire. L’échantillon est composé de 1 800 étudiants répartis à travers vingt-trois écoles secondaires aux États-Unis en 2012 dans lesquelles des cours préparatoires en science n’étaient pas offerts. Ces étudiants ont été aléatoirement assignés soit à un cours préparatoire en biologie, un cours préparatoire en chimie ou au groupe contrôle. Les chercheurs ont ensuite évalué les variables d’intérêt à l’aide d’un questionnaire et de données administratives de 2019 tirées du NSC (National Student Clearinghouse).

Conger, Long et McGhee ne trouve aucun effet significatif entre la prise de cours préparatoire en biologie ou chimie et les variables d’intérêts. La prise de cours préparatoire n’affecte ni l’application à des programmes de baccalauréat, ni l’inscription ou les résultats à l’examen d’entrée (SAT), ou ni l’inscription universitaire en général.

Les auteurs soulignent toutefois que la majorité des étudiants ayant suivi les cours préparatoires ont échoué l’examen associé à ce cours. Conséquemment, il est probable que cet échec ait eu un effet délétère sur les aspirations des étudiants. Les auteurs soulignent donc l’importance d’offrir plus de soutien aux élèves avant même qu’ils suivent les cours préparatoires afin de réduire les risques d’échec.


Pour en savoir plus:

Conger, D., Long, M. C., & McGhee, Jr. , R. (2023). Advanced Placement and Initial College Enrollment: Evidence from an Experiment. Education Finance and Policy, 18(1), 52–73. https://doi.org/10.1162/EDFP_A_00358


 

 

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Le Groupe de recherche en économie publique appliquée étudie les différentes politiques d’intervention de l’État. Il est actif en enseignement supérieur, en fiscalité et en simulations de politiques publiques.
 

 

 

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