Bonjour à tous,
Seront abordés dans cette veille les sujets suivants :
Bonne lecture!
Pour l’équipe de la veille de recherche,
Pier-André Bouchard St-Amant
Historique canadien de la liberté universitaire
Les frontières de la liberté universitaire font l’objet de débats publics récurrents. Les travaux de Paul Axelrod (2021) documentent l’histoire de la liberté académique au sein des universités canadiennes et de l’évolution de sa frontière à travers le temps.
Axelrod définit la liberté universitaire comme une autonomie professionnelle, distincte de la liberté de parole, qui est un droit citoyen. Il note que cette liberté a toujours été soumise à des contraintes, qu’elles soient religieuses, raciales, administratives ou financières. Au Canada, celle-ci n’a pas de statut officiel, alors qu’aux États-Unis par exemple, elle a été protégée à maintes reprises dans des interprétations judiciaires du premier amendement de la Constitution américaine.
Axelrod évoque que les menaces actuelles à la liberté universitaire proviennent des deux côtés de l’axe gauche-droit de l’échiquier politique : on note la « culture de l’annulation » (cancel culture) ainsi que la volonté de tout permettre, même les discours haineux. Axelrod note que les gouvernements, autant au niveau fédéral que provincial, n’ont pas tendance à s’ingérer dans la production universitaire. Au Canada, la liberté universitaire dépend généralement des universités elles-mêmes, au niveau institutionnel à travers des politiques internes.
Axelrod termine sur les enjeux actuels dont la société devrait se préoccuper : l’importance du financement privé en recherche, qui peut inclure des contraintes par rapport à ce qui peut être publié, particulièrement dans le domaine de la santé, ainsi que le droit des professeurs de s’exprimer, dans des circuits publics tels que les médias sociaux, sur des sujets hors de leur domaine d’expertise.
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La messagerie-texte : une stratégie efficace de rétention d’étudiants universitaires
Les étudiants à l’aube de s’inscrire à l’université peuvent parfois être perdu dans le processus, particulièrement pour les programmes contingentés qui exigent parfois, en plus d’une bonne moyenne, des entrevues ou la réussite d’examens particuliers. Avery, Castleman, Hurwitz, Long et Page (2021) ont voulu, à travers une expérience à assignation aléatoire, vérifier ce qui pourrait aider les étudiants dans ce parcours, notamment la messagerie-texte, associée soit avec un conseiller virtuel soit avec le conseiller pédagogique de l’école de l’étudiant.
Deux expériences ont été mises sur pied : une étude nationale couvrant plus de 70 000 étudiants au niveau secondaire répartis dans 15 états américains et une autre étude ciblant 20 000 étudiants au Texas. Alors que le groupe test de l’expérience nationale avait accès à un conseiller disponible en ligne, le groupe test de l’expérience au Texas avait plutôt un accès direct, à travers la messagerie-texte, à leur conseiller pédagogique. Les interventions des deux types de conseillers combinaient des messages textes informatifs à des moments clés de l’inscription à l’université et, pour les groupes tests, des messages textes incitant les étudiants à interagir avec le conseiller.
L’article, qui a étudié la cohorte de 2016-2017, a notamment découvert que l’impact des messages textes sur l’inscription à l’université à temps plein était significatif lorsqu’elle était combinée à de l’aide déjà implantée à l’école, augmentant de 2,9 points de pourcentage le taux d’inscription par rapport à la moyenne du groupe contrôle. Le conseiller virtuel, bien qu’il ait augmenté les taux de passation d’examen pour fin d’admission à l’université (e.g. SAT et ACT), a eu un effet statistiquement significatif négatif sur les taux d’admission à temps plein, le réduisant de 1,3 points de pourcentage.
Les auteurs expliquent cette disparité par des conflits avec des services qu’obtenaient déjà les étudiants. L’expérience du Texas permettait aux étudiants d’accéder rapidement à des services personnalisés, en offrant par exemple des rendez-vous en présence avec leur conseiller. Les auteurs recommandent donc, si un lien par messagerie-texte est offert aux étudiants, de le combiner à des services déjà présents dans les écoles et de personnaliser le plus possible les messages envoyés.
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Disparités entre les récents diplômés et diplômées canadiens : y a-t-il un écart important entre les genres ?
Jehn, Walters et Howells (2021), à partir de l’Enquête nationale auprès des diplômées (END) de Statistique Canada en 2013, ont voulu vérifier s’il y avait un écart entre les hommes et les femmes récemment diplômés, plus particulièrement dans leur statut d’emploi et leur revenu. Malgré le fait que leur stratégie d’identification de lien de cause à effet ne soit pas particulièrement robuste, leur étude est intéressante étant donné qu’elle nous éclaire sur les différences entre les domaines d’études des diplômés et qu’elle utilise des données canadiennes. Comme leur modèle est simple, il est également possible de recréer facilement l’étude selon les cycles de production de l’END.
Leurs résultats indiquent que les écarts de revenus sont les plus importants dans les domaines ayant tendance à offrir des revenus plus élevés, comme l’ingénierie. Dans ce secteur en particulier, les hommes gagneraient en moyenne 60 000 $ trois ans après leur diplomation alors que les diplômées dans la même situation obtiendraient 50 500$. Les auteurs n’ont pas trouvé de différence de revenu statistiquement significative dans les domaines des sciences sociales, de l’éducation et de la santé.
Jehn et al. ont également noté que les revenus des doctorants et doctorantes travaillant à temps plein étaient semblables. Toutefois, les chances d’être embauché à temps plein sont beaucoup plus faibles, et ce, à travers l’ensemble des domaines. Au niveau de la maîtrise, les revenus des récentes diplômées, trois ans après l’obtention de leur diplôme, étaient significativement plus bas que ceux des diplômés, même si les chances qu’elles soient à temps plein ne différaient pas.
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Est-ce que tous les étudiants universitaires en situation de handicap sont traités de la même façon ?
Druckman, Levy et Sands (2021) ont exploré les biais possibles que les services aux étudiants en situation de handicap pourraient avoir envers les étudiants ayant besoin de leur soutien. Ils ont notamment voulu vérifier la présence de biais racial et de biais envers les handicaps qui ne sont pas d’ordre physique.
Ils ont étudié les réponses d’un sondage envoyé à 618 intervenants dans des universités américaines. Les répondants devaient répondre à une mise en situation où un étudiant admis à leur université – sans être inscrit - leur demandait quels services pourraient lui être offerts. Huit profils d’étudiants pouvaient être présenté, variant selon la couleur de peau (afro-américain et blanc), la situation de handicap (déficience visuelle ou trouble du déficit de l’attention avec hyperactivité (TDAH)) et l’éthique de travail , c’est-à-dire si l’étudiant était décrit comme étant neutre (sans mention) ou travaillant (e.g. : mention de bonne réussite scolaire).
Les auteurs n’ont pas trouvé de biais racial dans leur étude. Toutefois, il semble que les personnes avec un TDAH, comparativement à celles ayant un handicap visuel, sont plus susceptibles d’être victime de biais s’ils ne mentionnent pas leur éthique de travail. Les auteurs théorisent que les étudiants rapportant un TDAH pouvaient être perçus comme paresseux et méritant moins d’accommodements. Ils ont évalué ce biais en demandant aux personnels d’estimer entre un et cinq, cinq étant le niveau le plus élevé, à quel point l’étudiant mérite des accommodements. À la suite de leur estimation par moindres carrés ordinaires, Druckman et al. ont constaté que la différence entre un étudiant avec TDAH avec preuve de son éthique de travail et un autre sans cette mention était de - 0,833, significatif à un niveau de confiance de 1%. Le coefficient restait négatif en vérifiant pour d’autres éléments, tels que la probabilité que l’étudiant reçoive des services au sein de l’institution et qu’il utilise les services offerts.
Cette étude, malgré son absence de stratégie d’identification de lien de cause à effet, éclaire néanmoins quant aux biais possibles qu’un étudiant en situation de handicap peut vivre. Les auteurs concluent en indiquant que ce biais peut se corriger en améliorant la perception des intervenants quant aux handicaps qui ne sont pas physiques.
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Impact de la crise de 2008 : est-ce qu’une crise économique influence le choix de domaine d’étude ?
Ersoy (2020) répond à cette question en comparant le taux de diplomation universitaire d’États américains fortement affectés par la crise avec ceux dont les effets se sont moins fait sentir. Utilisant un croisement de trois bases de données sur le marché de l’emploi, le nombre de diplômes octroyés et le suivi des récents diplômés sur le marché de l’emploi, l’auteur compare le pourcentage de diplômes obtenus dans deux secteurs : ceux dont les indicateurs du marché de l’emploi ont été sensibles à la crise et les secteurs où ces indicateurs sont restés stables.
Se servant d’une différence-en-différence pour estimer ses résultats, Ersoy confirme que les secteurs fortement affectés par la crise ont vu une diminution de leurs diplômés. Le pourcentage de diplômes attribués dans les secteurs sensibles par rapport à la totalité de diplômes a passé de 55% à 53,6%, une diminution de 1,4 points de pourcentages. Le pourcentage de diplômés provenant des secteurs résistants a plutôt augmenté de 1,5 points de pourcentage, passant de 45% à 46,5%. Ces résultats sont tous deux statistiquement significatifs à un niveau de confiance de 1%.
L’auteur continue en explorant l’impact chez les universités comprenant une majorité d’étudiants provenant de l’État dans lequel l’institution est implantée, partant de l’hypothèse que les étudiants locaux sont plus influencés par les conditions du marché du travail de l’État dans lequel ils étudient. On retrouve des résultats semblables à ceux énoncés plus haut dans les États avec un pourcentage d’étudiants locaux supérieurs à la médiane. Pour les États avec moins d’étudiants locaux, les résultats sont plus faibles (0,004% pour les secteurs résistants et -0,002% pour les secteurs sensibles) et non statistiquement significatifs.
Enfin, Ersoy étudie si les effets de la crise sont immédiats. En effet, la réduction du pourcentage de diplômes octroyés dans les secteurs sensibles est observable dès 2010.
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L’équipe de la veille de recherche vous souhaite de joyeuses fêtes!