VEILLE DE RECHERCHE EN ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

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Mars 2023

14e édition


Un condensé mensuel des dernières publications scientifiques sur l’enseignement supérieur

Ce mois-ci :

 

  • Sommaire des crédits budgétaires à l'enseignement supérieur
  • L'effet des crédits d'impôts conditionnel à la diplomation
  • Le tutorat en ligne et la réussite académique
  • L'impact des règles d'admission sur les finissants du secondaire

Puisque nous sommes à la fin du mois de mars, nous vous présentons une sommaire des annonces en enseignement supérieur incluses dans le dernier budget du Québec.

Nous vous rappelons que vous pouvez également accéder aux précédentes éditions de la veille en cliquant ici.

Bonne lecture!

 

 

 



Sommaire des mesures budgétaires 2023-2024 en enseignement supérieur

Le gouvernement québécois a déposé le 21 mars dernier le budget du Québec. La composition des crédits dédiés à l’enseignement supérieur suggère une certaine continuation des politiques antérieures.


Chiffres d’ensemble

Le budget québécois se base sur des estimations du niveau d’inflation de 6,7% en 2022 et de 3,5% en 2023. D’autre part, le taux de croissance du PIB réel devrait passer de 2,8% en 2022 à 0,6% en 2023 (Ministère des Finances du Québec, 2023a).

Les crédits alloués aux cégeps augmentent de 4,98% (+119,3 M$) par rapport à l’an dernier. Ceux alloués aux universités augmentent de 5,12% (+196,5 M$) par rapport à l’an dernier. Le budget au niveau des infrastructures de l’enseignement supérieur connaîtra une augmentation appréciable. Pour les cégeps, il s’agit d’une augmentation de 7,07% (+21,6 M$) alors que pour les universités l’augmentation est de 6,25% (+29,6 M$) par rapport à l’an dernier.

Les crédits accordés à l’aide financière aux études sont ceux qui connaissent la plus grande croissance avec une augmentation de 11,6% (+129,5 M$). La grande partie de cette augmentation provient des bourses incitatives et autres bourses avec une croissance de 47,3% (+79 M$) en raison notamment des « bourses Perspective Québec ». Les intérêts et remboursements aux banques augmentent de 5,3% (+1,2 M$) et les bourses consécutives aux prêts de 13% (+28 M$).

Les crédits alloués au Fonds de recherche du Québec augmentent relativement faiblement avec une croissance de 0,87% (+2 M$) par rapport à l’an dernier. Le gouvernement alloue aussi des crédits de 132,4 M$ dans un fonds provisoire additionnel pour des dépenses discrétionnaires.


Mesures ciblées

Le gouvernement poursuit ses investissements dans le but d’améliorer la réussite universitaire, ayant, depuis 2018, l’ambition de « favoriser l’accès, la persévérance et la diplomation ». Cette année, les crédits alloués à ces mesures ont triplé (+67,8 M$) par rapport à l’an dernier. La majeure partie de ces nouvelles dépenses (48,4 M$) correspond à la bonification permanente de l’augmentation des frais de subsistance inclus dans le calcul du Programme de prêts et bourses.

Le gouvernement prévoit améliorer la diplomation par une série de nouvelles mesures : amélioration de la reconnaissance des acquis (5,3 M$), soutien à l’apprentissage du français (2,7 M$), soutien à la location de locaux par les universités (20 M$), exemptions additionnelles de frais de scolarité pour étudiants étrangers (10 M$) et soutien à l’enseignement en milieu éloignés des grands centres (4 M$).  D’autre part, le gouvernement engage des fonds additionnels (11 M$) dans le soutien à la recherche et la transition numérique.


Pour en savoir plus :

Ministère des Finances du Québec (2023) Budget 2023-2024 – Un Québec engagé - Plan budgétaire. (url)

Secrétariat du Conseil du trésor (2023) Crédits et dépenses des portefeuilles. (url)


 

 


Les crédits d’impôt post-diplomation ont-ils des effets bénéfiques?

Dans le but d’encourager la persévérance scolaire, plusieurs provinces (le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse, la Saskatchewan et le Manitoba) ont, depuis 2005, mis en place des programmes de rétention des diplômés (PRD) dont l’élément central est un crédit d’impôt aux diplômés universitaires. Mikkola et Webb (2023) tentent d’évaluer l’impact de ces mesures sur la migration interprovinciale et les conditions de vie des diplômés.


Les PRD des différentes provinces consistent en des crédits d’impôt non-remboursable allant de 15 000$ à 25 000$ conditionnel à la diplomation de l’étudiant. Ces montants sont équivalent à 50% à 97% des frais de scolarité. L’idée de ces crédits est qu’un travailleur récemment diplômé pourra réduire son revenu imposé de manière à compenser les frais de scolarité qu’il a engrangé.

Les auteurs utilisent un devis de recherche de différence en différence afin d’identifier l’effet causal de ces politiques dans les quatre provinces mentionnées. Ils utilisent deux bases de données pour y arriver soit la Longitudinal Administrative Databank (LAD) et le Survey of Labour Income Dynamics (SLID). L’échantillon est constitué d’étudiants canadiens de toutes les provinces (à l’exception du Québec) ayant entre 18 et 28 ans entre les années 2005 et 2013. La taille complète de l’échantillon est de plus de 2,6 millions d’observations. Les chercheurs divisent l’échantillon en deux groupes soit, d’une part, le groupe traitement composé des étudiants éligibles aux PRD dans les provinces où le programme existe et, d’autre part, le groupe contrôle constitué des étudiants des autres provinces. Cette stratégie empirique permet de comparer les moyennes des deux groupes en regard de plusieurs variables d’intérêt comme le taux d’abandon, le taux de persévérance scolaire et l’endettement étudiant.

Les auteurs ne trouvent aucun effet significatif des PRD quant à la migration interprovinciale, ce qui indique que ces programmes échouent au chapitre de la rétention des diplômés. Les auteurs trouvent toutefois un effet sur la taille des prêts encourus par les étudiants. Les étudiants ayant accès au PRD ont en moyenne 123,10$ de moins en dettes (par rapport à une dette moyenne de 620$) que les étudiants n’y ayant pas accès. Selon certains des modèles de régression utilisés, les résultats montrent aussi que les PRD pourraient aider à diminuer le taux d’abandon universitaire. Les auteurs concluent que les implications pratiques de leur recherche sont assez ambiguës. D’un côté, les PRD ne semblent pas être un outil efficace pour s’assurer de la rétention des talents dans une province. De l’autre, les PRD sont une manière de réduire ex post les frais de scolarité des personnes qui décident de rester dans la province.


Pour en savoir plus :

Mikola, D., & Webb, M. D. (2023). Finish it and it is free: An evaluation of college graduation subsidies. Economics of Education Review, 93, 102355. https://doi.org/10.1016/j.econedurev.2023.102355


 


Le tutorat en ligne peut-il contribuer à l’amélioration des résultats académiques?

La pandémie de Covid-19 a rapidement changé les pratiques d’enseignement universitaire en accélérant la transition vers les outils en ligne. Hardt, Nagler et Rinckle (2023) tentent de mesurer l’effet sur la réussite de l’une de ces nouvelles pratiques, soit le tutorat en ligne.


Pour mesurer cet effet, les auteurs ont développé un programme de tutorat en ligne pour un cours obligatoires d’économie de premier cycle au sein d’une grande université allemande. Les chercheurs ont envoyé un courriel aux étudiants du cours annonçant ce programme. 226 étudiants se sont inscrits au programme de tutorat. Les chercheurs ont ensuite assigné aléatoirement les étudiants dans deux groupes. Les deux tiers de l’échantillon, soit 145 étudiants, forment le groupe traitement et ont suivi le programme de tutorat en ligne. Le reste de l’échantillon forme le groupe contrôle.

Le programme de tutorat en ligne comprend cinq sessions de 90 minutes en petits groupes dont l’essentiel du contenu porte sur la résolution d’exercices et d’examens des années précédentes. La présence à ces sessions n’est pas obligatoire et les chercheurs n’ont malheureusement pas de données sur la participation réelle des étudiants aux sessions de tutorat. À la fin du cours, les étudiants remplissent un questionnaire portant sur leurs habitudes de travail ainsi que leur santé mentale. Enfin, les chercheurs utilisent les données administratives des étudiants et de leur parcours académique afin de compléter leur analyse.

Les résultats de l’expérience suggèrent que le programme de tutorat en ligne a eu plusieurs impacts importants. D’abord, pour évaluer les comportements d’étude des étudiants, les chercheurs ont élaboré un index d’étude basé sur le questionnaire. Cet index reflète les réponses aux questions concernant la motivation, l’étude continu, la préparation à l’examen, etc. Les étudiants du groupe traitement ont une note moyenne sur cet index 2,1 fois supérieur à l’écart-type de la distribution du groupe contrôle. Ensuite, le programme semble avoir affecté la réussite dans ce cours de manière importante. Les étudiants complétant ce cours pouvaient obtenir 0, 5, ou 10 crédits selon leurs résultats. Le programme de tutorat a réduit la probabilité d’obtenir 0 crédit de 24% et augmenté les probabilités d’obtenir 5 et 10 crédits de 9% et 40% respectivement. Toutefois, la santé mentale des étudiants ne semble pas avoir été affectée par les programmes de tutorat.

Les auteurs concluent que les programmes de tutorats en ligne sont une option intéressante pour une institution cherchant à améliorer les résultats académiques des étudiants. Non seulement de tels programmes semblent efficaces, mais leur coût de mise en place est relativement faible.


Pour en savoir plus:

Hardt, D., Nagler, M., & Rincke, J. (2023). Tutoring in (online) higher education: Experimental evidence. Economics of Education Review, 92, 102350. https://doi.org/10.1016/j.econedurev.2022.102350

 

 

Les règles d’admission universitaire induisent-elles un changement de comportement chez les étudiants finissants?

Parmi les outils à la disposition des décideurs pour encourager l’apprentissage, une modification des incitatifs à l’étude est l’un des plus importants. Rodriguez (2023) étudie l’effet des politiques d’admission à la grandeur de l’État de la Caroline du Nord sur l’implication et la réussite des étudiants.

Depuis 2009, pour être admis dans le système universitaire du University of North Carolina (UNC), un étudiant finissant du secondaire doit avoir un minimum de 2.0 de note globale pondérée (GPA) et 700 points à l’examen d’admission standardisé (SAT). Rodriguez exploite ce changement dans les règles d’admission afin d’évaluer ses effets sur les comportements des étudiants lors de l’année avant leur admission à l’université à l’aide d’une régression de discontinuité. Il utilise les données administratives du réseau d’écoles secondaires (high schools) de la Caroline du Nord. Son échantillon comporte 75 000 étudiants du secondaire de la cohorte finissante de 2009 et ayant passé le SAT au début de l’année scolaire. Tous les étudiants ont eu des scores de SAT entre 600 et 800, soit près du seuil d’admission.

L’auteur divise l’échantillon en deux groupes. Le groupe traitement est composé des étudiants ayant eu un score supérieur ou égal à 700 et le groupe contrôle est composé des étudiants ayant eu un score inférieur à 700. L’idée derrière la conception de cette recherche est que les étudiants près du seuil d’admission ont, dans l’ensemble et pour un grand échantillon, des caractéristiques similaires à une exception : ceux qui ont un score SAT au-dessus du seuil perçoivent une probabilité d’admission positive et sont donc susceptibles d’être incités à changer leur comportement d’étude.

Les résultats montrent plusieurs relations intéressantes quant aux comportement des étudiants lors de leur dernière année du secondaire. D’abord, les étudiants appartenant au groupe traitement obtenaient en moyenne un GPA 0,08 points supérieurs aux autres, soit une augmentation de 2,8%. Ensuite, ces étudiants avaient aussi 1,5 jour d’absence de moins en moyenne et 0,07 moins de suspensions que les autres. L’auteur ne trouve aucun effet significatif en ce qui concerne le nombre de cours suivi. Finalement, les résultats montrent aussi que les étudiants du groupe traitement ont réduit le nombre d’inscription à des cours considérés comme « difficiles » au cours de leur parcours scolaire.

En somme, l’auteur défend que son étude montre que les seuils d’admission basés sur les résultats de tests standardisés peuvent avoir un effet positif sur l’engagement académique des étudiants. Cependant, ils peuvent aussi avoir des conséquences involontaires néfastes comme la sélection de cours stratégiques vers des domaines considérés comme plus faciles.


Pour en savoir plus:

Rodriguez, V. (2023). Student effort response to shifts in university admission policies. Economics of Education Review, 93, 102367. https://doi-org/10.1016/j.econedurev.2023.10236


 

 

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Le Groupe de recherche en économie publique appliquée étudie les différentes politiques d’intervention de l’État. Il est actif en enseignement supérieur, en fiscalité et en simulations de politiques publiques.
 

 

 

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