VEILLE DE RECHERCHE EN ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR
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Un condensé mensuel des dernières publications scientifiques sur l’enseignement supérieur |
Ce mois-ci :
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L’impact des frais sur les étudiants internationaux : le cas de l’État du Bade-Wurtemberg Si les dernières décennies ont vu une augmentation sans précédent du nombre d’étudiants internationaux (avec une augmentation de 68% entre 2008 et 2018); on sait assez peu de choses sur la façon dont ces étudiants sélectionnent leur pays d’étude et comment les politiques publiques peuvent venir influencer ces décisions. Vortisch (2023) s’intéresse à ce phénomène et tente d’évaluer l’impact de ce genre de politiques sur les flux migratoires académiques et sur la réussite académique de ces étudiants. Pour analyser ce phénomène, le chercher utilise des données longitudinales du gouvernement fédéral allemand et des États fédérés allemands pour une période allant de 1998 à 2019. L’échantillon final fédéral comprend un total de 10 603 observations pour 698 établissements, alors que l’échantillon final d’État comprend un total de 6 921 observations pour 466 établissements. Les données issues des États ont pour avantage de faire la distinction entre les étudiants internationaux selon leur citoyenneté et leur région géographique d’origine. Le chercheur tire parti de l’introduction en 2017 de frais de 1500 euros par semestre pour chaque étudiant provenant de l’extérieur de l’Espace économique européen. Cette politique possède de nombreuses exceptions, ce qui fait qu’uniquement la moitié des étudiants internationaux y sont réellement assujettis. Comme cette mesure n’est appliquée que par l’un des seize États fédérés allemands (l’État du Bade-Wurtemberg), alors que les autres États conservent une politique de gratuité, cela permet de créer deux groupes (un groupe traitement et un groupe contrôle) afin de réaliser une analyse de différence-en-différence. Les résultats obtenus indiquent que l’introduction de cette politique entraîne une diminution d’environ deux points de pourcentage du taux d’inscription internationale dans les établissements concernés. Le chercheur remarque que cette diminution affecte de manière disproportionnée les étudiants en provenance des continents africain et asiatique. Ce résultat résiste aux tests de robustesse de l'auteur. Il remarque également que, contrairement à l’un des arguments amenés par le gouvernement du Bade-Wurtemberg, cette politique ne semble pas avoir diminué le taux d’échec des étudiants internationaux aux examens finaux. Il note toutefois qu’il est peut-être prématuré d'en tirer des conclusions. Selon le chercheur, ces résultats suggèrent que le fait d’accroître les frais aux étudiants internationaux peut modifier considérablement la composition du corps étudiant d’un établissement. Les institutions d’enseignement peuvent alors compenser ces effets-prix en jouant sur la qualité afin d’attirer d’autres types d’étudiants internationaux ou nationaux, davantage qualifiés. L’auteur conclut en notant le besoin de recherches supplémentaires pour mieux évaluer les résultats de long terme de ce genre de politiques. Pour en savoir plus : Vortisch, A. B.
(2024). The land of the fee: the effect of
Baden-Württemberg’s tuition fees on international
student outcomes. Education Economics, 32(2),
141–166. https://doi.org/10.1080/09645292.2023.2194585
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Les établissements d’enseignement supérieur augmentent-ils leurs frais de scolarité suivant une hausse de l’aide financière reçue par les étudiants ? Li et Katri (2024) étudient l’impact des programmes d’aide financière de type Promise sur la hauteur des frais de scolarité. Les programmes Promise offrent aux étudiants des bourses ou des prêts s’ils choisissent de fréquenter un établissement d’enseignement supérieur situé dans les environs de leur école secondaire ou de leur lieu de résidence. Les critères spécifiques varient en fonction des programmes, qui sont déterminés par les États, les régions (counties) ou les villes. Les autrices cherchent plus spécifiquement à identifier l’impact de l’identité de l’autorité en mesure de déterminer les frais de scolarité, soit l’université elle-même soit l’État.Leur échantillon rassemble 29 programmes offrant de l’aide aux étudiants inscrits à des collèges de deux ans, implanté entre 2003 et 2013. Les programmes sélectionnés ciblent des collèges individuels, et non pas une région entière, afin de pouvoir isoler l’effet du programme sur les frais de scolarité. Le groupe contrôle de cette étude est donc composé des collèges situés dans les environs de ceux ayant implanté un programme Promise. De plus, afin d’éliminer un biais de sélection où les collèges ayant implanté un programme Promise différeraient de ceux n’en ayant pas instauré, le groupe contrôle inclut seulement des collèges ayant développé un tel programme plus tard que ceux du groupe traitement, soit entre 2016 et 2020. Les autrices étudient l’effet de ces programmes sur les frais de scolarité à travers une analyse de différence-en-différence à double effet-fixes, en estimant les coefficients à l’aide de l’approche de Callaway et Sant’Anna, qui cadre mieux avec les conditions du modèle. Enfin, Li et Katri conduisent une analyse d’évènement (event-study) afin d’explorer les effets potentiellement hétérogènes entre les cohortes d’adoption de programme. Les résultats obtenus contredisent l’intuition initiale des autrices. Parmi les établissements qui n’ont pas l’autorité de fixer la hauteur de leurs frais de scolarité, aucune différence entre le groupe contrôle et le groupe traitement n’a été observée. Toutefois, pour les collèges ayant ce pouvoir, les frais de scolarité des établissements du groupe traitement ont diminué de 14% à 17% comparativement au groupe contrôle. Les autrices expliquent ce résultat en indiquant que les programmes d’aide Promise sont de petite taille comparativement à d’autres programmes d’aide tels que les bourses Pell. Ces programmes ne seraient donc pas assez importants pour permettre aux collèges d’augmenter les frais de scolarité. Pour en savoir plus : Li, A. Y., &
Katri, P. (2024). Does Tuition-Setting Authority
Determine Whether Tuition Increases at Community
Colleges with New Promise Programs?. The Journal
of Higher Education, 1-30. https://doi.org/10.1080/00221546.2024.2301914
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Les modèles d’enseignement immersif sont-ils plus appréciés que les modèles traditionnels ? Alors que le modèle traditionnel d’organisation du calendrier académique est remis en question, des modèles alternatifs sont graduellement mis de l’avant. C’est le cas du modèle dit « par bloc immersif » où les étudiants apprennent sur des périodes d’enseignement de six semaines, plus courtes que les semestres traditionnels de 12 à 15 semaines. Goode et al. (2023) s’intéressent à la satisfaction des étudiants qui suivent ce parcours atypique, et tentent d’examiner cette satisfaction à travers de nombreux indicateurs. Pour analyser ce phénomène, les chercheurs utilisent des données de questionnaires d’évaluation de l’enseignement, réalisés par les étudiants et collectés lors des dernières semaines de la période d’enseignement, pour l’année 2019 et l’année 2021, dans une université publique régionale australienne. Les étudiants sont conviés par courriel à participer à ces questionnaires anonymes afin de répondre à 13 questions standards dont sept sont liées aux caractéristiques du cours et six sont liées à l’enseignement en lui-même. L’échantillon final comprend un total de 4 157 réponses. L’année 2021 est l’année pilote du modèle de bloc immersif alors que l’année 2019 est celle utilisant la prestation traditionnelle par trimestre. En faisant des appariements entre les programmes de cours similaires avant (en 2019) et après (en 2021) le changement, les chercheurs peuvent déterminer l’effet de ce nouveau mode sur la satisfaction des étudiants. Pour chaque cohorte pertinente, les chercheurs effectuent notamment des tests de chi-carré de Pearson. Ils font ensuite une analyse supplémentaire visant à comprendre quel indicateur de satisfaction est le plus déterminant. Les résultats obtenus indiquent que le passage du modèle traditionnel au modèle par bloc immersif a accru significativement le taux de satisfaction lié à cinq des sept indicateurs de cours et aux six indicateurs d’enseignement. Les chercheurs notent que, bien que la perception des étudiants concernant la charge de travail soit la plus susceptible de voir sa satisfaction diminuer, les étudiants ont une certaine tolérance à l’égard de celle-ci. Ils remarquent également que la satisfaction globale tend à augmenter principalement à cause de la satisfaction spécifiquement liée à l’enseignement ; surtout lorsque les étudiants ont la perception que le contenu est présenté de manière claire et que les enseignants témoignent d’une réelle préoccupation pour leur apprentissage. Selon les chercheurs, bien que cette étude soit de nature exploratoire, elle apporte des constats pouvant aider les établissements, départements et enseignants à mieux comprendre ce qui importe pour les étudiants. Il apparaît notamment que ceux-ci apprennent plus efficacement et avec davantage de satisfaction lorsque l’approche pédagogique est davantage active que celle utilisée traditionnellement par une acquisition passive de l’information. Parmi les activités de cette approche, on retrouve la résolution de problèmes, la discussion, le questionnement, la pratique, et la réflexion. Pour en savoir plus: Goode, E., Roche, T., Wilson, E., &
McKenzie, J. W. (2024). Student perceptions of immersive
block learning: an exploratory study of student
satisfaction in the Southern Cross Model. Journal of
Further and Higher Education, 48(2),
153–167. https://doi.org/10.1080/0309877X.2023.2277419
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Changement dans les préférences en enseignement supérieur en Colombie Bernal, Abadía, Álvarez-Arango et De Witte (2024) étudient l’impact de l’arrêt abrupt de Ser Pilo Paga (SPP), un programme d’aide financière ciblant les étudiants post-secondaire provenant de milieux défavorisés en Colombie. L’objectif de l’étude est d’observer s’il y a eu un changement dans les préférences en enseignement supérieur des étudiants ciblés par le SPP. Ce programme a été instauré en 2014 et couvrait 100% des frais de scolarité en plus de fournir une allocation variant entre 223$US et 892$US par trimestre, qui devait par la suite être remboursée. Il était toutefois possible de faire annuler ce prêt sous certaines conditions. Ce programme fournissait de l’aide à 10 000 étudiants par année, représentant environ 3% de la population admissible. Pour l’obtenir, les étudiants devaient réussir le Saber11, un examen standardisé similaire au SAT aux États-Unis, et provenir d’une famille à faible revenu. Le niveau de pauvreté des ménages est indiqué à partir de l’indice Sisben. Après les élections de 2018, le SPP a été brusquement interrompu en raison de son coût élevé, ce qui a pris la population par surprise. En effet, le président élu était le seul parmi les candidats à s'engager à maintenir le programme. Ce contexte permet aux auteurs d’emprunter une régression sur discontinuité afin d’évaluer l’impact de l’élimination de cette aide sur les préférences en enseignement supérieur des étudiants provenant de familles à faibles revenus. Les auteurs ont envoyé un sondage à un ensemble aléatoire d’école secondaire quelques mois avant et après l’annulation de ce programme. Ce sondage, répondu par 1567 étudiants en fin de parcours du secondaire, permet d’évaluer les préférences des étudiants par rapport à divers éléments relatifs à l’enseignement supérieur tel que la localisation de l’université, le niveau de rigueur/de prestige de l’établissement (le terme utilisé est « quality of higher education », mesuré en nombre d’étoiles), le type d’établissement (privé ou public) et l’aide financière (taille de l’aide, modalité de remboursements et types de l’aide). Les coefficients du modèle mesurent l’importance de chaque critère par rapport aux autres. Pour l’ensemble des étudiants, les bourses sont l’élément qui est le plus important, suivi par la rigueur et le prestige de l’éducation. Plus la taille des bourses est grande, plus celle-ci sera préférée par rapport à d’autres caractéristiques. La fin du SPP a changé ces préférences. L’importance des bourses chez les étudiants ayant répondu au sondage après l’annonce de son interruption diminue de 7 à 16 points de pourcentage par rapport à ceux ayant répondu avant l’annulation du SPP. Cet effet est plus important chez les étudiants les plus défavorisés, montrant une diminution de 25 à 31 points de pourcentage. L’annulation de ce programme est venue diminuer les perceptions de l’enseignement supérieur chez l’ensemble de la population ciblée par le SPP. Les auteurs indiquent que ce changement risque d’influencer l’accumulation de capital humain de la Colombie dans les prochaines années. Pour en savoir plus : Bernal, G. L.,
Abadía, L. K., Álvarez-Arango, L. E., & De Witte,
K. (2024). Financial aid uncertainty and low-income
students’ higher education preferences. Higher
Education, 87(6), 1845-1863. https://doi.org/10.1007/s10734-023-01094-w
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Le Groupe de recherche en économie publique appliquée étudie les différentes politiques d’intervention de l’État. Il est actif en enseignement supérieur, en fiscalité et en simulations de politiques publiques.
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