L’édition d’avril 2022 de la veille de recherche en enseignement supérieur abordera les
sujets suivants :
1. Comment l’information que reçoivent les étudiants affecte-t-elle leur performance dans
le cours ?
2. Les interventions basées sur la pleine conscience : bénéfiques pour la santé mentale
des étudiants
3. Connaître le taux d’abandon des études universitaires : pas d’effet dissuasif si les
préférences culturelles pour un tel parcours sont fortes
4. Quels facteurs peuvent inciter les étudiants à s’inscrire à plus de cours ?
Bonne lecture ! Nous vous rappelons que vous pouvez également accéder aux précédentes
éditions de la veille en cliquant ici
(
https://listes.grepa.ca/archives/list/veille@listes.grepa.ca/latest).
Comment l’information que reçoivent les étudiants affecte-t-elle leur performance dans le
cours ?
L’étude menée par Wright et Arora (2022) cherche combler l’écart entre les résultats que
les étudiants espèrent obtenir dans le cadre d’un cours et les résultats qu’ils obtiennent
réellement. Pour ce faire, les auteurs ont conduit une expérience de terrain dans un cours
de macroéconomie d’une université de grande taille aux États-Unis. Ce cours a été
sélectionné spécifiquement, car il est suivi par une large population d’étudiants, est
standardisé pour tous les professeurs et possède un des plus hauts taux d’abandon et
d’échec au sein de l’université. Les étudiants suivant ce cours sont généralement des
étudiants de première année.
L’expérience a été menée auprès de 392 étudiants ayant accepté d’être suivis, ce qui
équivaut à un taux de participation de 82%. Les étudiants ont été affectés aléatoirement
au groupe traitement ou au groupe contrôle. Tous les étudiants participants ont été par la
suite invité, dès la deuxième semaine de classe, à remplir un sondage afin de fournir
diverses informations relatives à leur statut socioéconomique et académique. On retrouvait
notamment leur performance académique passée, leur habitude d’étude, leurs attentes par
rapport à la difficulté du cours, leur attitude face au risque et l’information qu’ils ont
obtenue à propos du cours avant le début de la session.
Une fois ces informations recueillies, les étudiants du groupe traitement ont pu voir la
distribution des résultats des cours enseignés par leurs professeurs dans le passé. Par la
suite, l’ensemble des étudiants ont dû préciser la note qu’ils pensaient obtenir ainsi que
le nombre d’heures d’étude qu’ils voulaient consacrer au cours. Les étudiants ont ensuite
rempli au milieu de la session un sondage de suivi. La seule différence entre le groupe
traitement et le groupe contrôle était donc l’accès à l’historique des résultats du
cours.
Leurs résultats, provenant d’un modèle de régression linéaire incluant diverses variables
de contrôle, indiquent que l’expérience semble avoir amélioré la probabilité des étudiants
de réussir le cours. Alors qu’aucun effet statistiquement significatif n’a été noté sur
les notes, la probabilité de réussir augmentait de 10 points de pourcentage dans le groupe
traitement, un effet significatif à un niveau de confiance de 99%. Cet effet était plus
fort sur les étudiantes, sur les étudiants plus performants et sur ceux provenant de
milieux socioéconomiques plus favorisés. De même, les étudiants dont les attentes étaient
élevées au début du cours ont particulièrement profité du traitement.
Pour en savoir plus :
Wright, N. A., & Arora, P. (2022). A for effort: Incomplete information and college
students’ academic performance. Economics of Education Review, 88
(
https://linkinghub.elsevier.com/retrieve/pii/S0272775722000152)
Les interventions basées sur la pleine conscience : bénéfiques pour la santé mentale des
étudiants
Chiodelli et al. (2022) ont effectué une revue systématique de la littérature récente sur
les impacts des interventions basées sur la pleine conscience chez les étudiants
universitaires. La pleine conscience est définie comme l’habileté cognitive de pouvoir
être dans le moment présent et d’ouvrir l’individu à de nouvelles expériences. Dans le
cadre d’une intervention auprès de la population, la peine conscience peut être utilisé
pour traiter l’anxiété, la dépression, la dépendance, les troubles alimentaires et la
douleur chronique.
La revue systématique a permis de révéler 510 articles reliés aux mots-clés préalablement
déterminés, dont 19 répondaient à l’ensemble des critères de la revue et ont constitué
l’échantillon analysé. La plupart des articles étudiaient une population américaine
(31,57%) et chinoise (15,78%). Les articles ont été publiés entre 2017 et 2018. En tout,
2166 étudiants ont participé à ces études empiriques, la majorité étant des femmes. La
grande majorité des études concernait des interventions variant entre 45 et 120 minutes
hebdomadairement et dont la durée complète du programme variait entre 3 et 20 semaines.
Les principales variables dépendantes explorées par les différentes études étaient
principalement la pleine conscience (18%), l’anxiété (17%), le stress (14%), la dépression
(8%) et les impacts sur les résultats académiques (7%).
La revue de littérature révèle que, peu importe le nombre d’heures accordées aux
interventions, les effets semblent positifs, améliorant donc la santé mentale des
étudiants. La revue de littérature ne relève toutefois pas les effets quantitatifs
rapportés par les différentes études. Les auteurs mentionnent néanmoins que près du tiers
des études ne quantifiaient pas la taille des effets, rapportant seulement le niveau de
significativité statistique. Les articles étudiés n’ont également pas observé le taux
d’abandon des programmes mis en place.
Pour en savoir plus :
Chiodelli, R., Mello, L. T. N. D., Jesus, S. N. D., Beneton, E. R., Russel, T., &
Andretta, I. (2020). Mindfulness-based interventions in undergraduate students: A
systematic review. Journal of American College Health, 1-10.
(
https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/07448481.2020.1767109)
Connaître le taux d’abandon des études universitaires : pas d’effet dissuasif si les
préférences culturelles pour un tel parcours sont fortes
Cattaneo et Wolter (2022) ont étudié l’effet dissuasif de connaître le risque d’abandon
d’un programme universitaire sur les préférences des individus quant à leur scolarité. Ils
ont utilisé le cas de la Suisse, qui comporte trois groupes linguistiques distincts selon
la région : les germanophones en Suisse alémanique, les francophones en Suisse romande et
les italophones en Suisse italienne. La population de la Suisse alémanique a comme
particularité de préférer fortement un parcours pratique, optant à 80% pour une formation
professionnelle à la suite de leur étude secondaire plutôt qu’un parcours académique.
Cette proportion diminue plutôt à 50-60% pour la Suisse romande et la Suisse italienne.
À l’aide d’un sondage mené à l’automne 2019 auprès de 6014 Suisses, ils ont développé un
cadre expérimental permettant d’évaluer si le fait de connaître le taux d’abandon d’études
universitaires affecterait la préférence pour un tel parcours scolaire. Ils ont assigné
aléatoirement les participants au sondage à quatre groupes distincts : le premier se
faisait simplement demander s’il préférait que leur enfant (hypothétique) aille un
parcours académique ou un parcours vocationnel. Les groupes suivants se voyaient également
poser cette question, mais avec différentes informations additionnelles : un se faisait
communiquer que le taux d’abandon d’un étudiant moyen à l’université était de 50% et
l’autre de 80%. Enfin, le dernier groupe recevait des informations à propos des salaires
moyens des individus provenant des deux parcours à l’âge de 50 ans, mais aucune sur le
taux d’abandon.
Les auteurs évaluent l’effet du taux d’abandon sur la probabilité de préférer un parcours
universitaire. Leurs résultats montrent que, dans les régions préférant culturellement un
parcours universitaire, le fait de connaître le taux d’abandon n’a pas d’impact sur cette
préférence. Cet effet devient significatif Suisse alémanique, accentuant encore plus les
préférences pour un parcours vocationnel. Leur probabilité diminue en effet de 15,7 points
de pourcentage. Cet effet est significatif à un niveau de confiance de 99%. Le fait de
connaître la hauteur du salaire moyen à 50 ans selon les différents types de formation
suivie n’avait pas d’impact sur cette propension.
Les auteurs concluent que de faire connaître à la population les taux d’abandon élevés
des études universitaires ne semble pas avoir d’impact sur les comportements si la
population a déjà une préférence forte pour un tel parcours scolaire.
Pour en savoir plus :
Cattaneo, M. A., & Wolter, S. C. (2022). “Against all odds” Does awareness of the
risk of failure matter for educational choices?. Economics of Education Review, 87,
102225. (
https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0272775722000024?via%3Di…)
Quels facteurs peuvent inciter les étudiants à s’inscrire à plus de cours ?
McKinney et al. (2022) se sont penchés sur le processus de décision que les étudiants
empruntent lors de leur choix de cours, plus précisément le nombre de cours suivis. Ils
ont voulu examiner ce qui incitait les étudiants à faire des études à temps plein ou à
temps partiel. Ils empruntent une approche de la théorie du choix rationnel pour analyser
les décisions prises par les étudiants, en considérant que ceux-ci choisissent de
maximiser leur bien-être une fois les différentes contraintes prises en compte. Ils font
l’hypothèse que, pour certaines catégories d’étudiants, les coûts de s’inscrire à
l’université à temps plein (frais de scolarité, frais de transport, salaires perdus, etc.)
sont plus élevés que les bénéfices, et ce, suffisamment pour influencer leur
comportement.
Pour évaluer leur hypothèse, ils ont mené des entrevues à l’automne 2018 et au printemps
2019 auprès de 16 étudiants et 8 conseillers pédagogiques dans un community college texan.
Les auteurs ont retenu les nouveaux étudiants inscrits à au moins 12 crédits, ayant 18 ans
et ayant vu une vidéo sur la persévérance académique. 400 étudiants ont ainsi été
contactés.
Les auteurs ont noté que les facteurs les plus influents pour les étudiants étaient leur
performance académique, les enjeux financiers et leur expérience avec le système d’appui
de leur université. Les étudiants sentaient qu’ils devaient trouver un équilibre entre la
durée de leur scolarité et le degré de difficulté de chacune de leur session : la
flexibilité des cours, autant au niveau du format que du moment de leur offre, était un
enjeu particulièrement important. En ce qui concerne les considérations financières, outre
les frais de scolarité, les prix des manuels requis pour les cours, la distance à
parcourir pour se rendre sur le campus, de même que les obligations familiales sont tous
des facteurs que les étudiants considéraient dans le calcul du coût d’ajouter un cours
supplémentaire. Les conseillers pédagogiques ont quant à eux indiqué qu’il était important
pour les étudiants d’être considéré à temps plein, mais qu’ils les trouvaient peu préparés
à cette charge de travail. Par exemple, certains effectuent des retours aux études,
pensant pouvoir soutenir le même niveau que lors de leur premier passage à l’université,
mais cette fois en ayant des enfants et un emploi à temps plein. Les conseillers ont
également noté que de donner des encouragements aux étudiants, en marquant leurs
accomplissements et en les orientant sur la prochaine étape de leur parcours.
Pour en savoir plus :
McKinney, L., Burridge, A. B., Lee, M. M., Bourdeau, G. V., & Miller-Waters, M.
(2022). Incentivizing Full-Time Enrollment at Community Colleges: What Influences
Students’ Decision to Take More Courses?. Community College Review, 50(2), 144-170.
(
https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/00915521211061416?journalCode=…)