*VEILLE DE RECHERCHE EN ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR*
------------------------------------------------------------------------
Une image contenant texte, signe Description générée automatiquement
Août 2023
18^e édition
/Un condensé mensuel des dernières publications scientifiques sur
l’enseignement supérieur/
*Ce mois-ci :***
**
* Aide financière et persistance scolaire au Chili
* L'aide financière et l'obtention du diplôme au Brésil
* Les échecs d'accès à l'aide financière en Allemagne
* Le resserrement d'admissibilité à l'aide financière en Italie
Bonjour à toutes et tous! Nous vous proposons ce mois-ci une veille de
recherche axée sur les programmes d'aide financière aux études.
Nous vous rappelons que vous pouvez également accéder aux précédentes
éditions de la veille en cliquant ici
<https://listes.grepa.ca/archives/list/veille@listes.grepa.ca/latest>.
Bonne lecture!**
------------------------------------------------------------------------
*********Les étudiants obtenant de l’aide financière sont-ils plus
persistants?***
**
Au cœur des enjeux entourant l'accès et la réussite universitaire, la
question de l'effet des prêts étudiants sur la persévérance demeure un
sujet d'intérêt majeur. Card et Solis (2022) étudient l'impact des prêts
étudiants sur la persévérance universitaire au Chili. Leur recherche
vise à évaluer comment l'éligibilité à un programme de prêts influence
les taux de diplomation et de rétention des étudiants.
Les auteurs se penchent sur l'effet spécifique de l'admissibilité au
programme de prêts chilien en se concentrant sur les étudiants de
première année universitaire qui repassent le /Prueba de Selección
Universitaria/ (PSU), un examen national d'admission à l'université. Les
étudiants dont le revenu familial se situe en dessous du 80e percentile
et qui obtiennent un score de 475 points au PSU deviennent éligibles à
un prêt couvrant 85% des frais de scolarité pour la durée restante de
leurs études universitaires. Le design particulier de ce programme
permet l'utilisation d'une méthodologie de régression en discontinuité
pour comparer le parcours universitaire des étudiants juste en dessous
et juste au-dessus de ce seuil.
Pour ce faire, les auteurs combinent des bases de données relatives aux
étudiants ayant passé le PSU avec des registres administratifs de
l’ensemble des établissements d’enseignement supérieur chiliens. Cette
approche leur permet de suivre les étudiants même en cas de changement
d'institution, notamment s'ils décident de quitter l'université pour
s'inscrire à un programme de formation professionnelle (équivalent au
diplôme collégial technique au Québec). L’échantillon de cette étude
comprend 3 627 étudiants. Les auteurs soulignent que cette
sous-catégorie d’étudiants n’est pas représentative de l’ensemble de la
population universitaire, étant donné leurs plus faibles résultats
scolaires.
Les résultats montrent que l’admissibilité aux prêts est associée à une
augmentation significative des taux de réinscriptions dès la deuxième
année et jusqu’à cinq ans après la première inscription, correspondant à
la durée standard d’un baccalauréat au Chili. Plus précisément, les
étudiants marginalement admissibles présentent un taux de rétention
supérieur de 21 points de pourcentage par rapport à leurs pairs
marginalement non admissibles après la première année. Cette tendance se
maintient jusqu’à l’obtention du diplôme où les étudiants marginalement
admissibles ont un taux de diplomation 12 points de pourcentage plus
élevés. De plus, les auteurs observent une réduction du transfert vers
les écoles de formation professionnelle chez les étudiants bénéficiant
des prêts.
Fait notable, la transformation des prêts en bourses, une option
accessible aux étudiants atteignant un score de 550 points au PSU et se
situant dans le bas du 2e quintile du revenu familial, n’a aucun impact
sur le taux de réinscription ni sur le taux de diplomation. Les auteurs
interprètent ce résultat comme démontrant l’effet causal des prêts, qui
consiste à alléger les contraintes financières à l’enseignement
supérieur. Une fois ces contraintes levées, la décision de se réinscrire
n’est pas influencée par le coût de l’éducation universitaire, du moins
pour les étudiants issus de familles à faible revenu.
_Pour en savoir plus :_
Card, D., & Solis, A. (2022). Measuring the effect of student loans on
college persistence. /Education Finance and Policy/, 17(2), 335-366.
https://doi.org/10.1162/edfp_a_00342
**
------------------------------------------------------------------------
*
*
***L’aide financière rend-elle l’obtention du diplôme plus probable?***
Face au défi de l'accessibilité à l'enseignement supérieur pour les
étudiants issus de milieux défavorisés, la question de l'efficacité des
programmes d'aide financière étudiante (AFE) dans la promotion de la
réussite universitaire demeure une préoccupation majeure. L'étude menée
par Tenório de Freitas e Silva et Menezes Bezerra Sampaio (2023) se
penche sur l'impact du /Permanence Scholarship Program/ (PSP) sur la
durée des études et le taux de diplomation des étudiants brésiliens. Le
PSP est une bourse mensuelle destinée aux étudiants à faibles revenus,
offerte dans le cadre d’un programme plus vaste d'aide financière, le
/University for all Program/ (PROUNI).
L'étude comprend des étudiants inscrits dans des universités privées au
Brésil, avec des données recueillies à partir des recensements annuels
en enseignement supérieur colligé par la /Nacional Institute of Research
and Study Anísio Teixeira/ (INEP) de 2010 et 2017. Les auteurs ont ainsi
pu suivre le parcours de l’ensemble des étudiants brésiliens admissibles
au PROUNI pendant sept ans. La méthodologie adoptée par les auteurs
repose sur une analyse de survie, prenant la forme de trois approches
distinctes : l'estimateur de Kaplan-Meier, les risques concurrents et la
régression de Cox.
L’étude révèle que les étudiants bénéficiant du PSP ont réduit d'un an
la durée moyenne de leurs études. De plus, une augmentation
significative de la probabilité de diplomation dans les délais prévus
est observée, avec une augmentation de 9 points de pourcentage pour
l'obtention du diplôme en 3 ans et une augmentation de 7,6 points de
pourcentage pour la diplomation en moins de 4 ans. Cependant, malgré ces
améliorations, les étudiants bénéficiaires du PSP présentent une durée
d'études plus longue en comparaison avec la moyenne générale, prenant
environ six ans pour achever leur diplôme, contre trois ans pour les
autres étudiants. Par ailleurs, certaines catégories d'étudiants
bénéficient davantage du PSP, notamment les femmes, les personnes âgées
de plus de 30 ans et les récipiendaires de bourses de mérite, qui
présentent de plus grandes chances de réussir leur diplôme universitaire
dans les délais impartis.
_Pour en savoir plus : _
Tenório de Freitas e Silva, P. & Menezes Bezerra Sampaio, L.(2023). Does
student aid make a degree more likely? Evidence of the permanence
scholarship program from survival models. /International Journal of
Educational Development/, 96, 102697.
https://doi.org/10.1016/j.ijedudev.2022.102697
------------------------------------------------------------------------
*
*
***L’aversion à la dette et le programme de prêt des étudiants allemands*
Le gouvernement allemand a mis en place un généreux programme d’aide
financière aux études (BAföG), où 50% de cette allocation est composée
d'une subvention, tandis que les 50% restants consistent en un prêt à
taux d'intérêt nul. Malgré ces conditions avantageuses, seulement 28%
des étudiants éligibles profitent de ce programme. Fidan et Manger
(2022) tentent de trouver les explications probables à ce phénomène.
Se fondant sur l’état actuel de la littérature, les auteurs identifient
des échecs potentiels d’anticipation économique de la part des étudiants
qui pourrait influencer le faible taux d’application à la BAföG. Parmi
ceux-ci, l’information imparfaite, l’aversion au risque et à la dette
ainsi que le rôle des revenus étudiants sont déterminés comme des
facteurs pouvant expliquer cette situation. Fidan et Manger (2022)
construisent dans un premier temps un modèle microéconomique reflétant
le processus décisionnel des étudiants en incluant ces échecs. En
ajustant les paramètres à des niveaux vraisemblables, les auteurs
réalisent des simulations où 63,52% des individus éligibles n’appliquent
pas à la BAföG, ce qui correspond plus au moins aux niveaux observés.
Afin de tester leurs hypothèses, les auteurs utilisent les données
tirées du /German Socio-Economic Panel/ (GSOEP). Ce panel comprend des
informations sur 9170 étudiants allemands de 2001 à 2013. Les auteurs
restreignent leur échantillon à 412 étudiants étant éligibles à la BAföG
et dont les données socio-économiques sont complètes. En utilisant une
régression Probit groupée, les auteurs identifient des corrélations
entre la probabilité d’application à l’aide financière (variable
dépendante) et différents indicateurs socio-économiques (variables
indépendantes) tels que le revenu étudiant, celui des parents, et les
préférences aux risques et à la dette.
Les résultats de la régression montrent que le revenu des parents est
hautement corrélé avec la décision d’obtenir de l’aide financière,
montrant une surévaluation de leur importance dans le programme. Une
augmentation de 1% du revenu parental est associée à une augmentation de
34,4% de ne pas appliquer au soutien financier. Une hausse du revenu
étudiant est aussi faiblement associée à la non-application (+ 2,5%).
Finalement, le fait d’avoir une grande aversion au risque est associé à
une augmentation de 12,2% dans la probabilité de ne pas réclamer d’aide
financière. Les auteurs concluent en soutenant qu’une politique d’aide
financière visant à soutenir les étudiants les plus pauvres sans
discrimination à l’égard de leurs caractéristiques psychologiques doit
prendre en considération les comportements observés et s’assurer de bien
communiquer les informations concernant les risques.
_Pour en savoir plus: _
Fidan, M. & Manger, C. (2022). Why do German students reject free money?
/Education Economics/. 30:3, 303-319.
https://doi.org/10.1080/09645292.2021.1978937
<https://doi.org/10.1080/00221546.2022.2044976>__
------------------------------------------------------------------------
************
*
*
*Les effets du resserrement de l’admissibilité aux prêts et bourses sur
la réussite académique*
La plupart des programmes d’aide financière aux études (AFE) ont des
critères d’admissibilité basés sur les besoins afin de répondre à des
impératifs d’équité. Toutefois, en y attachant des critères basés sur le
mérite, les programmes peuvent devenir plus efficaces. Minaya, Agasisti
et Bratti (2022) étudient l’impact d’un tel changement survenu dans un
programme d’AFE en Italie.
En 2011, à la suite de coupes budgétaires, le programme d’AFE de la
région de Lombardie a resserré ses critères d’admissibilité pour le
maintien de l’aide financière après la première année d’étude. Le nombre
minimum de crédits réussi dans la première année est passé de 25 à 35
(sur 60). Les chercheurs ont concentré leur attention sur l’université
polytechnique de Milan (ci-après PoliMi) au cours de la période 2008 à
2018. À l’aide des données administratives de cet établissement, un
échantillon de 27 000 étudiants a été isolé.
Afin d’estimer l’impact du changement de règle, les chercheurs ont
utilisé un design de régression par différence-en-différence. Ils
comparent les données des étudiants bénéficiant de l’aide financière
(groupe traitement) à celles des étudiants n’en ayant pas bénéficié
(groupe contrôle). Les variables d’intérêts observés par les chercheurs
portaient principalement sur des indicateurs de réussite académique tels
que le nombre de crédits complétés, les notes moyennes, le taux de
rétention des étudiants et la probabilité de diplomation dans les délais
normaux.
Les auteurs montrent que le resserrement des règles d’admissibilité à un
effet globalement positif sur la réussite académique. À court terme, on
observe une hausse de 1,8 crédit complété lors de la première année
ainsi qu’une hausse de 0,3 de la note globale des étudiants. À plus long
terme, la probabilité de diplomation dans les délais normaux augmente de
9%. Toutefois, la réforme est aussi liée à des effets négatifs,
notamment pour les étudiants à « habiletés plus faibles » qui ont vu
leurs résultats académiques décliner. Enfin, il est important de noter
que, comme l’étude porte sur un seul établissement d’enseignement, la
validité externe des résultats est limitée.
_Pour en savoir plus : _
Minaya, V., Agasisti, T., & Bratti, M. (2022). When need meets merit:
The effect of increasing merit requirements in need-based student aid.
/European Economic Review/, 146, 104164.
https://doi.org/10.1016/j.euroecorev.2022.104164
------------------------------------------------------------------------
**
Une image contenant texte, signe Description générée automatiquement**
**
Le Groupe de recherche en économie publique appliquée étudie les
différentes politiques d’intervention de l’État. Il est actif en
enseignement supérieur, en fiscalité et en simulations de politiques
publiques.
**
------------------------------------------------------------------------
**
Liste de diffusion de la veille de recherche en enseignement supérieur
-- veille(a)listes.grepa.ca
Pour vous désinscrire, envoyez un courriel à
veille-quitter(a)listes.grepa.ca <mailto:veille-leave@listes.grepa.ca>**